Un Malien d’une quarantaine d’années a été expulsé, mardi dernier, vers Bamako. Père de deux enfants nés en France, ex-employé dans une entreprise de nettoyage, il vivait en situation irrégulière en région parisienne depuis plus de cinq ans. À Fontenay-sous-Bois où la famille a vécu deux ans, l’annonce de son expulsion a été un choc. Des militants et la mairie de la ville se sont mobilisés pour lui.
Une semaine après l’expulsion, mardi 14 décembre, de Mamadou Diarra, l’émotion est encore vive à Fontenay-sous-Bois. C’est dans cette ville du Val-de-Marne que le Malien d’une quarantaine d’années et sa femme ont vécu pendant près de deux ans. Malgré un déménagement provoqué par l’arrivée de leur second enfant en septembre dernier, le couple était resté très proche de l’équipe locale du Secours catholique et du collectif Fontenay pour la diversité.
Mamadou Diarra a été arrêté le 28 octobre, à Clichy-sur-Seine (Hauts-de-Seine) alors qu’il était sorti faire quelques courses. Sa femme et leurs deux enfants, de 3 et 20 mois, se trouvaient alors dans le nouvel hébergement que leur avait attribué le 115 à la suite de la naissance du benjamin.
« Deux jours après son arrestation, un juge des libertés et de la détention (JLD) a ordonné qu’il soit relâché parce que le temps de sa garde à vue avait été dépassé. Mais la préfecture de police de Paris a fait appel et l’a maintenu en détention », explique à InfoMigrants Sylviane Gauthier, conseillère municipale à Fontenay-sous-Bois, déléguée à l’accueil et à l’aide à l’intégration.
« Il était positif »
Retenu au centre de rétention administrative (CRA) de Vincennes, Mamadou Diarra a été expulsé vers Bamako, mardi 14 décembre. Ce jour-là, Fadila, une assistance sociale bénévole du Secours catholique de Fontenay-sous-Bois qui ne souhaite pas que son nom de famille soit publié, devait lui rendre visite au CRA.
« Quand je suis allée le voir [la fois précédente], il y avait sept policiers autour de nous donc on ne pouvait pas discuter. Mamadou était dans un coin de la pièce, on s’est parlé à travers la vitre mais on ne s’entendait pas très bien. C’est vraiment le mode carcéral là-bas. J’avais ramené du dentifrice et du produit pour la douche mais on m’a tout pris au motif que c’était opaque et qu’on ne voyait pas ce qu’il y avait dedans », se souvient-elle.
Malgré sa détention, Mamadou « était très positif », affirme la bénévole. « Il était très heureux qu’on soit au courant [de ce qu’il lui arrivait]. Il n’arrêtait pas de penser à ses enfants et sa femme. »
« Normalement, on n’expulse pas les parents d’enfants nés en France »
Pour le Secours catholique, comme pour la municipalité de Fontenay-sous-Bois et le collectif Fontenay pour la diversité, la nouvelle de son expulsion a été un choc. « Normalement, ils n’expulsent pas des parents d’enfants nés en France, ou bien il faut que ce soit des gens qui sont allés en prison ou des choses comme ça. Ce n’est pas du tout le cas de M. Diarra », souligne Sylviane Gauthier.
La conseillère municipale est d’autant plus surprise qu’une large mobilisation s’est mise en place pour soutenir Mamadou Diarra après son arrestation. « La pétition qui a été lancée n’a pas pu échapper [à la préfecture]. Il y a eu plus de 8500 signatures. Le maire Jean-Philippe Gautrais (PCF) a écrit au préfet de police de Paris, Didier Lallement le 1er décembre, le député du Val-de-Marne Guillaume Gouffier (LREM) a, lui, écrit au ministre de l’intérieur », énumère-t-elle. Le 7 décembre, la sénatrice Laurence Cohen (PCF) a, elle aussi, demandé la remise en liberté de Mamadou Diarra au préfet de Paris dans une lettre.
« Pendant deux ans, il a travaillé »
Tous dans leur courrier ont souligné l’intégration du père de famille et sa volonté de déposer une demande de régularisation après plus de cinq ans passés sur le territoire et l’exercice de plusieurs emplois. « Pendant deux ans, il a travaillé dans une entreprise de nettoyage qui a fermé à cause du Covid-19 », précise Fadila.
Malgré l’expulsion, les soutiens de Mamadou Diarra n’envisagent pas de baisser les bras. « La pétition est toujours ouverte. On encourage aussi les gens à envoyer des lettres à Emmanuel Macron et à Mme Macron pour dire qu’on est choqués. On prépare de notre côté un courrier associatif. On pense aussi saisir le défenseur des droits de l’enfant sur le fait qu’un père et une mère doivent rester au plus près de leurs enfants », détaille Fabien Caze, secrétaire du collectif Fontenay pour la diversité, interrogé par InfoMigrants.
Fadila, elle, a déjà écrit à Emmanuel Macron quelques jours après l’expulsion de Mamadou Diarra. En attendant des nouvelles du dossier, l’assistante sociale bénévole se concentre sur le reste de la famille qu’elle essaie de faire revenir à Fontenay-sous-Bois. « J’essaye de travailler avec le 115 de façon à ce qu’on permette à sa femme de revenir. Il y a une classe pour son fils aîné et le plus petit pourrait aller à la halte-garderie, comme ça, elle pourrait reprendre les cours d’alphabétisation ».