Aujourd'hui le Sénégal est marqué par un débat quasi inutile, mais qui a la valeur de montrer la faillite totale du système éducatif sénégalais. Faut-il rendre plus sévère la sanction pénale voire criminaliser l’homosexualité ? De toute façon à ce jour aux termes de l'article 319 du code pénal sénégalais alinéa 3 issu de la loi 66-16 du 12 février 1966 : " l'homosexualité est punie par un emprisonnement de 1 à 5 ans et d'une amende de 100.000 à 1.500.000 de francs C.F.A. et sera puni quiconque aura commis un acte impudique ou contre nature". A propos de la sévérité des peines ; une peine privative de liberté est considérée plus sévère qu'une peine non privative de liberté, entre deux peines privatives de liberté, la plus sévère est celle dont la durée est plus longue et entre deux peines d'amende donc non privatives de liberté, la plus sévère est celle dont le quantum est le plus élevé. L'efficacité de la sanction pénale comme moyen de prévention sociale de la déviance est sa capacité dissuasive. Le thème de la prévention pénale avec une sanction plus rigoureuse de ce délit puni par nos morales religieuses est aujourd'hui plus que jamais au centre du débat suite à l'instrumentalisation du phénomène par les médias sénégalais. La sanction pénale agit comme un contre motif au motif criminel, immoral et amoral en raison de son triple effet : - L'effet d'intimidation en raison de son caractère affligeant et socialement humiliant. -L'effet de moralisation et d'éducation comme expression concrété de la réprobation sociale. - L'effet de créer des habitudes et des attitudes au respect de la loi qui renforcent le sens de l’obéissance à celle-ci. La prévention pénale constitue un instrument constant, essentiel et indispensable par lequel toute société démocratique et organisée cherche à contenir tout acte criminel et immoral. La sanction pénale est " l'extrema ratio" expression latine pour désigner remède extrême, la solution la plus douloureuse et la plus violente. Mais si la sanction pénale était efficace pour lutter contre les facteurs criminogènes, pourquoi y a t-il possibilité de récidivisme ? La sanction pénale peut-elle être efficace pour lutter contre un phénomène social immoral et amoral rejetée par toutes les religions. ? Que peut la sanction pénale sur un phénomène qui existait avant la bible et le coran et que certaines nations surtout occidentales acceptent ou tolèrent ? Reprenons le père catholique Agostino Gémelli (1878 - 1959) : " il ne s'agit pas de punir, de sanctionner, mais d'éduquer pour récupérer socialement" Tous ces gens qui défendent ce projet de criminaliser ce phénomène social sont des professeurs, des enseignants, des imams, des pères de familles des responsables de syndicats et des acteurs de la société civile. Personne ne doute de la légitimité de leur lutte, ni de l'importance de leur combat, de leur mission religieuse et sociale, mais en tant qu’éducateurs, s'ils n'utilisent pas l'arme de l'éducation comme moyen de prévention sociale ; ils vont lamentablement échouer et en même temps doivent rendre leurs tabliers d'éducateurs et peut être même de père de famille. La prévention sociale générale a pour fonction d'éliminer ou d'atténuer les causes sociales probables de la criminalité voire de toute déviance sociale par des activités de nature législative, administrative et plus généralement sociale et culturelle. Elle doit rendre les citoyens acteurs convaincus de valeurs sociales, des normes et des vertus morales et religieuses sur lesquelles toute communauté, tout groupe social, toute nation a besoin pour son épanouissement total. La défense des valeurs morales de la société (SAMM JIKKOYI en wolof) suppose une restauration et un renforcement des systèmes de contrôle et de protection de chaque société : famille, école, religions, systèmes d'éducation intramuros et extramuros, élaboration de valeurs morales et réprimande sociale des faits immoraux et amoraux. La prévention sociale consiste à l'action directe sur l'individu pour l'empêcher de tomber ou de retomber (récidive) dans la déviance sociale. La personne est un être faible, fragile et disposée à violer les normes morales et sociales si les systèmes de contrôle et de moralisation sociaux ne sont pas toujours actifs et présents. Le sentiment d'être coupable ou celui de la vergogne pour qui viole les valeurs morales et la peur de perdre l'estime et l'affection de son groupe social, de sa famille, de ses amis, de son quartier peuvent être des facteurs déterminants pour éviter toute déviance sociale. L'être humain est un animal social et moral capable d'intérioriser des normes sociales et morales de son propre groupe social et capable de les respecter et de les suivre juste pour rester membre de son groupe social et surtout de sa famille, car la récupération sociale surtout dans la société sénégalaise est souvent difficile voire impossible. Selon Albert Einstein : " l'individu est ce qu'il est et est ce qu'il représente non pas tant pour son individualité mais par le fait d'être membre d'une grande société humaine qui dirige son être matériel et moral de sa naissance à sa mort. Toutes nos actions et nos désirs sont liés à l'existence des autres." Des millions et des millions de croyants à un seigneur unique DIEU ne pourront jamais accepter ni intérioriser dans leur conscience ce phénomène de déviance sociale et morale, mais vouloir le combattre avec une peine de prison ou une peine pécuniaire est peine perdue et bataille perdue d'avance. Tous nos enfants au Sénégal, malheureusement pour leurs familles qui en souffrent énormément, qui quittent le pays et sont accueillis à bras ouverts dans de nombreux pays qui acceptent ce phénomène en les intégrant socialement en mettant à leurs dispositions documents de séjour, logement, travail et protection sociale. L'effet pervers de ce combat peut être la recrudescence de l'immigration clandestine. Les clandestins sénégalais en Europe peuvent désormais avoir un motif réel d'obtenir l'asile socio- politique d'autant plus les européens portent une sensibilité particulière à la protection des personnes persécutées pour des orientations sexuelles. Le Sénégal est toujours considéré comme un pays démocratique, de liberté d'expression et d'opinion, de respect des droits humains sans persécutions pouvant entendre des exilés. Tous ces professeurs, imams, syndicalistes peuvent constituer un groupe d'éducation politiquement désintéressé mais socialement intéressé par la moralisation de la société sénégalaise. En quoi faisant ? Pour le bien du pays ils peuvent être volontairement des médiateurs sociaux. La médiation sociale a pour rôle la vulgarisation des normes sociales pour une culture de régulation et de prévention des conflits sociaux. Elle se base sur trois principes. - Soutenir la communication entre citoyens pour développer une culture de tolérance et de compréhension - Intégration entre personnes de générations différentes pour prévenir et combattre à l'origine toutes les contradictions sociales source de conflits, d'incompréhensions et de heurts. -Encourager un plus grand rapprochement entre les jeunes et les institutions et les normes sociales, politiques, juridiques et étatiques de gestion de la cité Alors tous ceux qui pensent et qui défendent qu'endurcir la sanction pénale, criminaliser cette déviance sociale et morale selon leurs religions et leurs normes sociales est la solution sine qua non ; c'est juste un médecin qui propose une recette médicale qui au lieu de soigner la maladie, l'aggrave. Si l'autorité du président russe Poutine n'a pu rien faire, si l'extrémiste de droite le hongrois Viktor Orban a fini par céder, comment le Sénégal avec une simple menace de sanction pénale sévère soit elle pourra t-il éradiquer ce phénomène séculaire, d'autant plus qu'on parle d'homosexuels qui sont socialement invisibles. Pères de familles, imams, éducateurs, professeurs, syndicalistes, société civile etc., la solution et l'unique solution est dans la prévention sociale générale par l'éducation mais jamais dans la prévention pénale
Magatte Simal C.A.D.E.E.S Italie