A ce jour un mot est fréquemment utilisé dans le langage sénégalais, sans que personne ne puisse donner son origine, ni son créateur. Tout ce que l'on puisse dire ce mot désigne une catégorie socio- professionnelle. Les immigrés sénégalais en Europe particulièrement en Italie sont appelés " modou- modou ". Bon gré, mal gré le terme " modou- modou " a souvent une nuance péjorative tendant à déprécier ou à dénigrer l'immigré pris comme bras bionic sans aucune formation scolaire. La " Fatou- Fatou" est le féminin de modou- modou"; donc c'est la sénégalaise qui a muri un projet migratoire pour venir en Italie voire en Europe dans l'objectif d'améliorer ses conditions de vie et celles de la famille au pays. Alors la femme du sénégalais " modou- modou " arrivée en Italie par le processus du regroupement familial n'est pas donc à proprement parler une "Fatou - Fatou". C'est une femme mariée qui a rejoint la maison conjugale. Le regroupement familial est une procédure administrative établie par l'Italie par l'article 28 du texte unique sur l’immigration ; elle permet aux étrangers non ressortissants de l'union européenne de voir affirmé leur droit à l'unité familiale.
En janvier 2023, sur une estimation de 111.000 sénégalais présent en Italie, environ 30.000 sont des femmes. Mais selon la direction des statistiques de l’Italie au 1° janvier 2022, 29.418 femmes sénégalaises étaient légalement résidentes en Italie. Elles se regroupent particulièrement dans trois régions du nord de l'Italie : la Lombardie 11067, la Toscane 3233 et l'Emilia Romagne 3251. La province de Bergamo en Lombardie abrite le plus de femmes sénégalaises qui sont la sixième communauté de femmes sur l'ensemble des femmes immigrées. L'unique explication est que ces trois régions du nord italien regroupent la grande partie des travailleurs sénégalais en Italie. Selon le dernier rapport du ministère italien du travail de 2021, 36,2% des femmes sénégalaises travaillent dans les services sociaux, puis dans le secteur hôtelier et de la restauration. Le " gender pay gap" c'est à dire la différence moyenne entre le salaire brut des hommes et celui des femmes est quasi de 600 Euro. Il y a un profond écart sur le taux d’occupation ; il est de 73% chez les hommes et de 21,1% chez les sénégalaises. La faible participation des sénégalaises dans le marché du travail italien a pour première conséquence la faible intégration de la femme sénégalaise en Italie. Deux causes sont évidentes : l'absence de formation professionnelle et en langue car sont en majorité analphabètes.
Une autonomie insuffisante et d'un isolement social
La vie d'une femme sénégalaise en Italie n'est pas de tout repos. Entre la culture traditionnelle de femme au foyer s'occupant des enfants sans aucun réseau social familial comme au Sénégal et les réalités sociales italiennes avec ses exigences financières, beaucoup de femmes sénégalaises ne parviennent pas à s'adapter et souffrent. Selon une étude de Pape Demba Fall, Emmanuela Gamberoni et Elena Mandelli intitulée " Donne dal Senegal al nord dell'Italie: il caso di Bergamo", en 2008, 67% des femmes sénégalaises affirmait être en Italie pour s'occuper de la famille. Il ressort de plusieurs femmes dans une interview entre les pages 199 et 201 de cette étude que les sénégalaises en Italie souffrent d'une autonomie insuffisante et d'un isolement social ; le milieu social se limite entre le mari et ses enfants dans un appartement.
Aujourd'hui, il est difficile par des chiffres ou par un pourcentage précis de déterminer le nombre de divorces dans la communauté sénégalaise, mais de bouche à oreille le divorce de couples sénégalais est un problème récurrent dans la diaspora. Grandes sont la souffrance et la dispersion de beaucoup de familles sénégalaises en Italie. Le drame est incommensurable quand les services sociaux italiens récupèrent les enfants des couples en difficulté pour les placer en adoption le plus souvent dans des familles italiennes pour le principe des droits de l'enfant à une vie sereine.
Il est à peu près sûr au regard des nombreux conflits dans de nombreux ménages sénégalais que le projet du regroupement familial n'était pas bien cerné par les deux partenaires. L'objectif du regroupement familial pour le mari est d'amener sa femme et comme toute femme sénégalaise pour s'occuper de la famille ; mais il arrive souvent que certaines femmes se fixent au départ d'un projet de migration économique poussée en cela par son entourage social. Membres de sa famille et ses amies exigent à cette femme qui devait rejoindre la maison conjugale de s'armer de responsabilité et de courage pour travailler et se faire de l'argent. IL est donc évident que de nombreux conflits découlent de cette double interprétation. Pour le sénégalais lamda, voyager en Italie signifie chercher de l'argent et en conséquence le début des pressions familiales et sociales pour satisfaire ceux qui sont restés au pays. Pour éviter l'échec de son ménage, la femme doit s'armer de beaucoup de courage pour tourner à son entourage social au Sénégal et aura besoin pour cela d'un mari conscient pour l'épauler dans sa mission : vivre en harmonie avec son mari au grand bénéfice de ses enfants. Au-delà de la recherche du gain, d'autres situations socio- culturelles peuvent créer des différents dans le ménage qui peuvent finir au divorce. Très souvent un mari trop lié à la tradition sénégalaise d'une femme à la totale disposition de son mari ; est-ce possible en Italie surtout si la femme comme le mari fait un travail à temps plein ? La seconde situation est cette femme sénégalaise qui a accepté le mariage juste pour venir en Europe ou cette femme sénégalaise qui a tendance à épouser les principes du système libéral mariage en Italie où la femme est souvent d'être chef de famille décide de tout. Le troisième cas de figure source de conflit dans le ménage est cette femme habituée à gérer seule sa famille. Le mari en Italie envoie des sommes énormes à la femme au Sénégal seule responsable des dépenses. En Italie le changement de situation et surtout l’impossibilité de disposer de l’argent peut être source d'incompréhension et de frustrations.
Un désaccord juste pour l'appropriation de l'allocation familiale provinciale
Donc il est à peu certain que résoudre le problème de l'argent dans le ménage sénégalais en Italie porterait à éradiquer plus de 80% des causes des nombreux divorces dans la diaspora dont les conséquences sont plus que désastreuses sur les enfants. Entre récupération d'enfants mineurs par les services sociaux, abandon scolaire, fréquentation de la rue qui porte actuellement beaucoup de jeunes sénégalais âgés de 18 à 23 ans en prison, l'enfant sénégalais dont les parents sont en désaccord est sacrifié d'autant plus le réseau familial est absent. Combien de ménages sénégalais dans la province de Trento sont en désaccord juste pour l'appropriation de l'allocation familiale provinciale. Pourtant du point de vue de la loi italienne et même du point de vue de la moralité, l'allocation familiale appelé " assegno unico " en Italie est destinée à la femme. C'est un regroupement de plusieurs allocations que l'Etat italien a créé pour aider la femme et ses enfants : bonus bébé, carta d'achat pour la femme en maternité, allocation communale de maternité etc. Pourtant la communauté des bengalais en Italie qui vivent cette tradition de femmes au foyer ne connaissent ce drame des nombreux divorces. il est presque impossible de voir une femme bengalaise qui travaille.
Les maris bengalais dans le respect de la loi et de la morale italienne versent la totalité des allocations familiales qui varient de 600 à 2000 à la femme qui acceptent de rester au foyer avec un revenu substantiel pour se prendre en charge et aider la famille au pays. Si les sénégalais exigent la femme au foyer, il suffit de lui laisser les allocations familiales pour lui permettre d'avoir un revenu mensuel : une solution parmi tant d’autres : LA BALLE EST DANS LE CAMP DE TOUTE LA COMMUNAUTE POUR REFLECHIR ENSEMBLE A UNE SOLUTION ET METTRE A CE DRAME DES DIVORCES.
Magatte Simal
C.A.D.E.E.S.Italie